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20 Mars 2024

« Le monde est complexe et nous avons besoin d’appréhender cette complexité pour se forger un esprit critique efficace »

Implantée depuis 1999 au sein de l’École des Mines de Saint-Étienne, la Rotonde est le seul Centre de Culture Scientifique, Technique et Industrielle en France à être intégré à une grande école d’ingénieurs. Rencontre avec son directeur, Guillaume Desbrosse.

Guillaume Desbrosse, vous dirigez la Rotonde, pouvez-vous nous en dire plus sur ce lieu ?

La Rotonde est un centre de culture scientifique pour parler des sciences au plus grand nombre. Nous fêtons cette année ses 25 ans. 25 ans d’engagement pour vulgariser les sciences à travers de nombreux projets et partenaires qui nous accompagnent. L’enjeu est pour nous de permettre à chacun et chacune d’entrer en interaction avec les sciences et pour cela nous imaginons et développons des projets variés à destination de nombreux publics et sur de multiples thématiques.

Ainsi à travers nos deux lieux culturels et nos actions hors les murs vous pouvez par exemple dans la même semaine découvrir une grande exposition sur le magnétisme, participer à un atelier fusée à eau ou assister à l’enregistrement d’un podcast sur le numérique responsable. La Rotonde c’est 52000 visiteurs par an et 17 permanents qui s’engagent à créer des programmations culturelles pour s’immerger dans les sciences.

Quel est le lien avec l’Ecole des Mines Saint-Etienne ?

La Rotonde est un centre à part entière de Mines Saint-Étienne qui a fait un choix stratégique puissant il y a 25 ans de porter le dialogue sciences et société en son sein et à travers un lieu et une équipe dédiés. Les liens sont donc solides et l’équipe de La Rotonde travaille étroitement avec l’environnement de l’école des Mines de Saint-Étienne. Par exemple nous accompagnons les équipes de recherche dans leurs réponses aux différents appels à projets comme l’ANR pour porter et imaginer un axe sciences et société qui soit pertinent, innovant et efficace. Nous avons une équipe dédiée pour cela et les demandes sont nombreuses. Nous sommes aussi en lien avec les élèves ingénieurs où nous intervenons dans plusieurs cycles pour parler médiation des sciences.

En quoi ce lieu est-il unique ou en tout cas original en France ?

Nous sommes à ce jour le seul centre de culture scientifique, technique et industrielle implanté dans une école d’ingénieurs. Nous sommes soutenus largement par les collectivités locales qui apportent depuis 25 ans un soutien massif à nos activités. La Rotonde est aujourd’hui tête de réseau sur la diffusion des sciences dans le département de la Loire et est reconnue par ses pairs comme un lieu porté sur l’innovation et dont ses qualités de médiation sont louées.

Être au cœur de l’enseignement supérieur est une force et nous permet d’être au plus proche des chercheurs et offrir ce lien essentiel entre les citoyens et le monde des sciences. C’est une fierté de voir chaque jour des enfants, des adultes franchir les grilles de l’école des Mines et venir s’immerger dans nos propositions culturelles. Pour Mines Saint-Étienne, c’est la possibilité d’avoir un campus ouvert sur la vie de la ville et c’est selon moi un atout indéniable.

Pourquoi est-il fondamental pour vous d’éveiller la curiosité de chacun et chacune ?

Car le monde est complexe et nous avons besoin d’appréhender cette complexité pour se forger un esprit critique efficace. Nous nous engageons à diffuser auprès de nos publics la démarche expérimentale chère à nos scientifiques qui est un atout dans la vie de tous les jours. Pour le public c’est sa faculté à ne pas prendre tout ce qui est dit sur les réseaux sociaux par exemple pour la vérité absolue. Faire la différence entre connaissance et croyance, comprendre comment les faits scientifiques sont établis et donner la possilbité de participer à l’imagination du monde de demain.

Nous nous engageons à ouvrir le champ des possibles pour toutes et tous et ne laisser personne au bord du chemin de la curiosité. L’enjeu majeur pour nous est de diversifier les publics et d’aller « conquérir » de nouveaux publics qui sont encore loin de nos activités. L’inclusion est une thématique très forte dans notre structure.

Nous vous savons convaincu de l’intérêt d’amener plus de petites filles et d’adolescentes vers les sciences à travers vos actions ? Pouvez-vous nous en dire plus ?

II est évident qu’il est hors de question de proposer des actions culturelles sans la moitié des personnes présentes sur notre territoire. Mais la réalité est violente et les filles sont moins présentes dans les sciences. Le constat est là et à notre échelle avec nos moyens nous tentons d’inverser la tendance négative. Nous avons élaboré collectivement une charte au sein de l’équipe pour sensibiliser l’ensemble du personnel à ses enjeux et traduire concrètement dans nos actions les efforts que nous devons mener : de la communication aux projets, tout est fait pour donner la possibilité à chaque public de s’imaginer une suite « scientifique » à son projet personnel.

Nous portons ainsi plusieurs projets autour de la thématique filles et sciences, mais le plus emblématique est « sciences en tout genre » qui donne la possibilité à des jeunes collégiennes et lycéennes de rencontrer des actrices du monde de la science dans des formats adaptés et propices à la libération de la parole. Les résultats sont très positifs et La Rotonde a reçu un prix national pour ce projet de la part de la CDEFI. C’est une fierté, mais nous voyons aussi les limites notamment celle de la montée en charge et notre capité à solliciter plus de personnes par an.

Quelle est votre vision de l’inclusion ? Pourquoi le hors les murs est-il particulièrement important ?

Il est essentiel de sortir de ses murs pour aller voir les publics là où ils sont. Cela serait une facilité que d’attendre patiemment qu’ils viennent un jour franchir les portes de nos lieux. La réalité est que beaucoup de personnes n’ont pas prévu dans leurs agendas de venir visiter un centre de sciences et pour des raisons qui sont louables : la méconnaissance, la peur d’être stigmatisé, de ne pas être à la hauteur, des mauvais souvenirs de sciences à l’école, de franchir les portes d’une grande école d’ingénieurs, etc. Je pourrais encore lister de nombreuses raisons valables, alors c’est à nous d’inverser tout cela et d’expliquer qui nous sommes et comment nous travaillons ; La Rotonde est un lieu où chacun et chacune à sa place, peu importe d’où vous venez, votre culture ou votre histoire.

Notre travail est d’inclure largement et donner cette envie de participer avec nous à un moment de plaisir avec les sciences. Ainsi nous envoyons des médiateurs dans les centres commerciaux de la ville et ils font des « show science », le public s’attroupe, joue, rie avec les médiateurs et pour la plupart viennent ensuite dans nos lieux culturels. Le hors les murs c’est aussi le monde rural, éloigné des grandes villes et qui n’ont pas la facilité de venir jusqu’à Saint-Étienne, à nous d’aller les voir et proposer des actions culturelles.

Vous êtes soutenu par la Métropole Saint-Etienne, que finance ce soutien ?

La métropole de Saint-Étienne est un partenaire majeur de nos actions de diffusion des sciences. Elle intervient sur plusieurs sujets comme l’éducation aux sciences en milieu scolaire, elle soutient notre nouveau lieu Explora qui a ouvert il y a trois ans et qui propose dans des grandes salles d’ateliers de « faire des sciences » avec des activités ludiques autour de l’ingénierie.

La métropole est aussi un soutien sur de nombreux évènements que nous portons comme la Nuit européenne des chercheurs ou la Fête de la science que nous coordonnons sur notre territoire. Elle est aussi à nos côtés dans le cadre de l’académie de la médiation ou nous déployons un programme de formation pour les médiateurs culturels du territoire pour qu’ils montent en compétence et ainsi délivrent un travail encore plus qualitatif aux publics. Les collectivités au sens large sont des partenaires essentiels à nos actions et qui sont engagés fortement dans le dialogue sciences et société.

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